Suzy Wincker première présentatrice de la télévision française 3/3
08 juil. 2021Dernière partie de cette série de 3 articles sur SUZY WINCKER avec une documentation très complète.
l'article est paru dans les cahiers de la FNARH 143, fédération d'associations à laquelle appartient l'ACHDR.
Cette inauguration officielle est précédée de répétitions. Lorsqu’en 1961, on commémore le 25e anniversaire de la télévision française, l’hebdomadaire de TV Télé 7 jours (14 janvier 1961) en raconte les débuts, en particulier en publiant des témoignages des deux premières présentatrices « l’officieuse » Suzanne Bridoux et l’officielle Suzy Wincker (figure 17).
Dans L’Aurore du 15 janvier 1961 (figure 18), Suzy Wincker raconte avec plus de détails encore sa mésaventure. L’article donne d’autres informations notables.
Fig. 16. – La photo illustrant cet article a été prise par un amateur en juillet 1936. Télé 7 jours du 14 janvier 1961. Dossier Suzy Wincker.
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Fig. 17. – Télé 7 jours du 14 janvier 1961. Dossier Suzy Wincker.
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Fig. 18. – L’Aurore du 15 janvier 1961. Dossier Suzy Wincker.
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La prise de vue est directe, mais le moteur de la caméra 180 lignes est tellement bruyant qu’il faut la placer derrière une vitre, ce qui limite fortement les possibilités de la prise de vue.
Le studio, situé dans les locaux de l’École supérieure des Postes et Télégraphes, rue de Grenelle (figure 19), est doté d’un éclairage d’une puissance totale de 45 kW, qui nécessite une importante installation de climatisation.
Fig. 19. – Studio situé dans les locaux de l’École supérieure des Postes et Télégraphes. Revue Générale d'Électricité, 1936. Caractéristiques techniques du poste émetteur de télévision de la tour Eiffel. Coll. ACHDR et J. Poinsignon.
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On a vu que le premier émetteur, placé au pilier nord de la tour Eiffel (figure 20) avait une puissance de 2,5 kW. Un nouvel émetteur, sur 8 m de longueur d’onde d’une puissance de 25 kW, est mis en service en mai 1936. Le signal est transmis à l’antenne par un feeder de 350 mètres de long, seule 50 % de la puissance de sortie de l’émetteur arrive aux doublets rayonnants.
Le son est émis toujours de la tour Eiffel par un émetteur fonctionnant sur 207 mètres.
Fig. 20. – Bâtiment de la salle des machines du poste installé au pilier nord de la tour Eiffel. Revue Générale d'Électricité, 1936. Coll. ACHDR et J. Poinsignon.
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René Barthélemy signale des essais de réception faits en avion pour tracer le diagramme de rayonnement horizontal de l’aérien, ceci en vue d’évaluer la portée pratique de réception. La conclusion sera que l’émetteur est à même de couvrir la région parisienne.
À cette époque, les techniciens utilisaient déjà bien sûr le terme de télévision, mais elle a failli porter le nom « commercial » de Radiovision, comme on peut le voir sur la photo prise rue de Grenelle en juillet 1936 (figure 21).
Le choix final fait l’objet d’une discussion en France et le nom de télévision a été retenu car adopté dans les pays voisins (figure 22).
Fig. 21. – Marianne, 20 janvier 1937. Dossier Suzy Wincker.
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Fig. 22. – Télé 7 jours, 14 janvier 1961, reprenant un article de l’époque sans citer la source. Dossier Suzy Wincker.
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C’est bien d’émettre, mais il faut recevoir (figure 23). La CDC a créé deux modèles de poste récepteur : le petit qui ne comporte que le récepteur de télévision (figure 24). Le grand (figure 25), avec dans le même meuble, le récepteur de télévision et un récepteur de téléphonie sans fil pour l’accompagnement sonore.
Mais des ingénieurs comme Chauvière construisent des kits pour les amateurs de télévision et les mensuels d’informations générales, comme Lectures pour tous (figure 26), illustrent leurs articles avec des photos prises sur les appareils en fonctionnement réel.
Fig. 23. – Toute la Radio, août 1936. Dossier Suzy Wincker.
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Fig. 24. – Appareil récepteur de télévision de la Compagnie pour la Fabrication des Compteurs et Matériel d’Usines à Gaz, petit modèle. Revue Générale d'Électricité, 1936. Coll. ACHDR et J. Poinsignon.
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Fig. 25. – Appareil récepteur de télévision de la Compagnie pour la Fabrication des Compteurs et Matériel d’Usines à Gaz, grand modèle. Revue Générale d'Électricité, 1936. Coll. ACHDR et J. Poinsignon.
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Fig. 26. – Lectures pour tous, juillet 1937. Dossier Suzy Wincker.
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René Barthélemy prend alors la responsabilité de la société Emyradio, créée pour la fabrication et la diffusion de récepteurs destinés au grand public.
Les matériels vont rapidement évoluer et le petit modèle « EMYVISOR » (figure 27) recevra bientôt et la « PHONIE et la VISION ».
Fig. 27. – Télé 7 jours, 14 janvier 1961. Dossier Suzy Wincker.
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Les deux récepteurs (figure 28), datant de 1936, sont actuellement visibles dans le conservatoire de l’ACHDR.
Fig. 28. – Deux modèles de téléviseur, 1936. Coll. ACHDR et J. Poinsignon.
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1937, c’est aussi l’année de l’Exposition universelle de Paris, et les PTT y ont un stand, dans lequel la télévision française est présentée. Un studio (figure 29) est installé au Pavillon de la Radio, mais la CDC ne le fournit pas. Elle a été évincée au profit de LMT (Le matériel Télégraphique) qui, fournit un émetteur 450 lignes tout électronique.
Fig. 29. – Photo originale. Dossier Suzy Wincker.
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Les émissions se poursuivent en 180 lignes jusqu’au 10 avril 1938. Les équipements sont alors démontés et ensuite remontés pour des démonstrations en dehors de Paris, comme à Limoges ou à Lille. En effet, la télévision mécanique a atteint ses limites, le tout électronique est là, avec l’émetteur de l’Exposition, qui sera remplacé le 25 décembre 1938, par un nouvel émetteur 455 lignes. Mais, nous voici en 1939 et le cours de l’histoire va brutalement changer.
Quant à Suzy, elle continue sa tâche même si les temps sont durs ! (figures 30 et 31) Elle est la première speakerine officielle, suivie de nombreuses autres, dont les plus célèbres sont, dès 1949, Jacqueline Joubert puis, Catherine Langeais, Jacqueline Huet, Jacqueline Caurat, Anne Marie Peysson, Denise Fabre et bien d’autres.
Fig. 30. – Photo originale. Dossier Suzy Wincker.
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Fig. 31. – Le Haut-Parleur, février 1937, Paris-Spectacles, 1937.
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Le téléspectateur d’aujourd’hui, lisant ces quelques lignes ne pourra s’empêcher de sourire, lui qui, a même le choix (grâce au replay) dans la date, pour regarder telle ou telle séquence. Mais il a fallu en passer par là. Quant aux techniciens d’aujourd’hui, selon le mot de Bernard de Chartres, qu’ils se souviennent que s’ils voient loin, ce n’est pas à cause de la perspicacité de leur vue, c’est qu’ils sont assis sur des épaules de géants.
Annexe 1
Coll. ACHDR et J. Poinsignon (non daté, 1930 ?).
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Annexe 2
8 décembre 1935
RADIO PTT VISION
Programme de la soirée présenté par Madame Suzy Wincker
– Une scène de la féerie : Les trois petits cochons et le grand méchant loup interprété par les petits Redon, Berjac, Cazenave et la petite Manès, du Théâtre du petit monde.
– Danses de Nikita.
– Roger Bourdin de l’Opéra-Comique : Les vieilles de chez nous de Ch. Levadé et Paysage de Reynaldo Hahn.
– Un sketch de Tristan Bernard : Révélation interprété par Georges Colin et Jane Lory.
– Poésies dites par Jane Provost.
– Germaine Lubin de l’Opéra : D’amour, l’ardente flamme de Berlioz.
– Béatrice Bretty et Georges Lafon de la Comédie-Française dans une scène du Bourgeois Gentilhomme.
– Suzanne Lorcia, danseuse étoile de l’Académie Nationale de Musique.
– Gilles et Julien dans leur répertoire.
– Lys Gauty dans son répertoire.
– Noël-Nöel dans ses œuvres.
– Pauley dans Un homme heureux, sketch de Dorin et de Saint Granier avec Pierre Blancart et Suzy Leroy.
– Fernand Gravé, Germaine Dermoz et Jacques Erwin, dans une scène d’Élisabeth la femme sans homme.
– Elvire Popesco et André Lefaur dans une scène de Vive le Roi !
– Gaby Morlay et Victor Boucher, dans un fragment du Billet de loterie de Francis Croisset.
– Sacha Guitry et Jacqueline Delubac dans un à-propos de Sacha Guitry.
– Intermède de danse par Melle Zoula de Boncza.
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Le Figaro du lundi 9 décembre 1935 donne un compte rendu de la manifestation accompagné de photos. BNF Gallica.
Document établi par Pierre Arcangeli à partir d’Une histoire de la télévision en France de Jacques Poinsignon.
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